Les femmes jouent un rôle essentiel dans la vie économique et sociale de la société malienne. Depuis très longtemps, elles sont organisées en groupements coopératifs d’entraide. La caisse de ces associations est utilisée pour diverses dépenses d’intérêt général. Elle sert aussi de caisse de solidarité, en cas de maladie grave par exemple. Enfin, elle permet aussi de faire des prêts avec intérêts aux membres de l’association qui peuvent ainsi gagner de l’argent, par exemple en achetant du coton pour le filer ou en faisant du commerce de détail. Chaque femme mariée doit en effet, dans la société rurale malienne, prendre elle-même en charge nombre de dépenses de la famille : vêtements, médicaments, fournitures scolaires, etc…
Depuis 2006, notre association a consenti dix-huit microcrédits à des associations de femmes de la région de Douentza au Mali. Le principe en est le suivant : les prêts sont faits sans intérêts mais nous demandons en contrepartie que les intérêts versés par les femmes qui empruntent à la caisse de leur association soient capitalisés afin de nous rembourser, ce qui permet à l’association des femmes de constituer progressivement des fonds propres.
Ce principe fonctionne bien. La réussite de l’association « Les Déesses » par exemple, la première à avoir bénéficié d’un microcrédit de « Villages Dogons », est impressionnante. Elle a remboursé en cinq ans notre prêt initial de 500 000 francs CFA (762 €), et elles disposaient après ce remboursement d’un capital de 885 000 francs CFA (1 349 €) qu’elles continuent à faire fructifier.
Le fonctionnement des microcrédits a, bien sûr, été perturbé par la situation au Mali. Beaucoup de femmes ont fui Douentza pendant l’occupation de cette ville par le MUJAO. La plupart sont aujourd’hui revenues mais certaines associations de femmes n’ont pas repris leurs activités et n’ont pas remboursé la totalité de l’argent que nous leur avions prêté. C’est le cas de l’association « Babahou Condey » (qui nous doit 300 000 FCFA - environ 457 euros) dont la présidente a définitivement quitté Douentza, et de l’association « Dié man guélé » (qui nous doit 70 000 FCFA) dont Moussa ne réussit pas à rencontrer la présidente. L’association des femmes mossi, dont nous annoncions l’état de « cessation de paiement » dans notre précédent bulletin, a cependant remboursé 145 000 FCFA (221 €) depuis lors. Les 80 000 FCFA restant sont dans les mains de deux des membres de l’association qui ne sont pas revenues du Burkina Faso où elles s’étaient réfugiées. Quant à l’association « Faïda » sa présidente a dit à Moussa qu’elle récupérait l’argent peu à peu et qu’elle rembourserait bientôt les 150 000 FCFA qui restent dus. Enfin, les membres de l’association « Tinaré » (qui reste nous devoir 87 000 FCFA (133 €) se sont cotisées pour rassembler 35 000 FCFA (53 €) qu’elles ont remis à leur présidente mais celle-ci ne les pas encore transmis à Moussa.
Les villages des alentours de Douentza n’ont pas été occupés par le MUJAO. Les associations de femmes n’y ont pas interrompu leurs activités et elles fonctionnent bien. Elles ont présenté leurs comptes à Moussa qui les a visitées en janvier et février. Il s’agit des associations de Koumbé-Bom, de Guénébana, de Gamni, de Yoboudou ainsi que des associations Fafa Dabou et Koïdyna de Walo. Toutes ont fait des bénéfices que Moussa a laissé dans leur caisse pour leur permettre d’accroître leurs activités.
Les 400 000 FCFA (610 €) du prêt que nous avions accepté de renouveler à l’association des teinturières n’ont pas encore été versés. Leur présidente, Madina, se fatigue plus vite avec l’âge et elle n’a plus la force d’aller rencontrer les femmes de l’association qui sont dispersées dans plusieurs villages, certains assez éloignés. Nous attendons donc que l’association se trouve une nouvelle présidente de confiance.
Il n’y a pas que les associations villageoises qui fonctionnent bien. Deux associations de Douentza sont exemplaires : l’association « Neema Melloukia » et l’association « Sabouniouma ». Cette dernière vient d’ailleurs de rembourser l’intégralité des 500 000 FCFA (762 €) que nous lui avions prêtés car elle n’en a plus besoin. En trois ans les intérêts versés par les membres de l’association à leur caisse et qui ont été capitalisés sont suffisants pour un fonctionnement autonome.
L’association « Ben Kan » a également remboursé le prêt de 500 000 FCFA que nous leur avions accordé l’an passé. Mais Moussa n’a pas renouvelé ce prêt car il a été informé que, cette année, l’argent avait été utilisé uniquement par la présidente.
Malgré les difficultés rencontrées, et qui sont compréhensibles dans le contexte politique du Mali, le bilan des microcrédits nous semble globalement positif. Nous avons récemment accordé deux nouveaux prêts de 300 000 FCFA chacun à deux associations de femmes qui font du petit commerce « au bord du goudron », autrement dit qui vendent boissons, fruits, beignets… au bord de la route Bamako-Gao aux voyageurs qui circulent sur cet axe.